« La crème de la crème ne sera peut-être pas une crème ». C’est par cette question que le chapitre consacré aux formes innovantes dans un ouvrage récent adresse cette question. Est-ce que ce seront plutôt des formules dans un emballage, ou au contraire des dispositifs plus sophistiqués comme des appareils, ou encore des approches couplant formules et dispositifs, éventuellement connectés et pilotés par des applications « intelligentes », on verra. Mais il y a tout lieu de penser que les formes classiques seront complétées par ce biais.
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Certains pensent que ces objets de beauté́, ce que nous appelons maintenant les « beauty toys », sont des inventions récentes. Mais en fait de tous temps les gens se sont intéressés à la façon d’entretenir la beauté́ à l’aide d’instruments. Pour en être convaincu, il suffit de contempler des gravures de la fin du XIXe siècle qui décrivent la salle de bain de la « Dame moderne » dans laquelle on reconnaitra quelques éléments qui fleurissent à l’heure actuelle. Des appareils et des dispositifs divers ont été proposés à l’usage, souvent dans des milieux spécialisés, mais également au niveau du grand public, comme en témoigne le catalogue d’appareils pour soins de beauté de la société Laveur et Niédrée de 1922.
En cosmétique il y a un principe de base de la cosmétique qui dit « primum non nocere », qui était de ne pas brusquer la peau. Dorénavant, beaucoup de ces techniques consistent en fait à stresser la peau de façon modérée pour provoquer une réponse qui se manifestera par une amélioration. Le stress sera généré de différentes façons, mais ce stress devra être non invasif, ce qui signifie que la peau reste intacte dans la mesure où l’on respecte son intégrité. Les objets de beauté que nous connaissons actuellement sont apparus à la fin de la décennie 90, et au début des années 2000. L’un des tous premiers était une sorte de fer à repasser les rides basé sur l’idée de chauffer le collagène pour le réticuler formant ainsi une tension. Il s’appelait Tripolar et a été vendu pendant quelque temps dans des magasins d’électroménager !
On compte actuellement de nombreuses technologies pouvant supporter ces dispositifs, mais que l’on peut résumer en quelques classes d’effets technologiques :
- Mécanique, que l’on appelle dorénavant la « mécanobiologie »,
- La température, chaud ou froid,
- La lumière,
- Les champs électriques ou magnétiques,
- Les objets connectés.
Vous trouverez sur le site de la Cosmétothèque des explications détaillées de ces différents effets et des techniques qui vont avec.
Du point de vue technique, certaines de ces techniques ont été soumises à des études pour validation. Mais d’une façon générale, ces tests de validation ont été menés par les sociétés ayant développé ces techniques, ce qui conduit à questionner sur l’indépendance vis-à-vis de l’évaluateur et du coup sur la validité des résultats. Très peu ont fait l’objet d’études indépendantes et les publications sont rares. D’autre part, ces techniques reposant sur l’idée d’appliquer une « énergie » sur la peau en vue d’une réaction, le contrôle du niveau énergétique est une question centrale. En effet, autant il est concevable de contrôler convenablement les procédures dans le cas d’une pratique encadrée en milieu professionnel, autant ceci devient difficile concernant un dispositif grand public. La conséquence en est que les niveaux énergétiques sont souvent inférieurs, ce qui a comme tendance de minimiser les effets. Ceci étant dit, ce n’est pas pour autant que certaines de ces techniques ne présentent pas des résultats intéressants, assez souvent même concurrents avec les produits cosmétiques classiques, voir même supérieurs.
L’un des faits marquants a consisté en ce que ces dispositifs sont passés progressivement de l’usage professionnel vers des utilisations à domicile, d’où l’importance de la question réglementaire. Pratiquement aucun de ces dispositifs n’existaient lorsque les dispositions réglementaires actuelles ont été définies. Avec leur développement, de nombreuses discussions ont eues lieu pour savoir si ces dispositifs relevaient de la réglementation cosmétique. À date, il existe plusieurs points de vue. On doit considérer en premier lieu que ces dispositifs relèvent de la sécurité générale des produits et de ce point de vue doivent satisfaire aux différentes disposions en vigueur. Dans un second temps on devra tenir compte des revendications et de la définition du produit. Mais la mention : « substance ou mélange » dans cette définition fait que certains s’orientent vers d’autres dispositions réglementaires, en particulier les dispositifs médicaux dits Medical device. Cette question reste à ce jour en débat et doit être validée au cas par cas.
Pour en savoir plus, nous vous conseillons de lire le chapitre s’intitulant « la cosmétique instrumentale » dans le remarquable ouvrage coordonné par Vincent Faivre, « Conception des produits cosmétiques : les formes innovantes ».
Vous trouverez également sur le site de la Cosmétothèque les liens utiles à ce podcast.
Bonne écoute, ou bonne lecture, ou les 2.
Jean Claude LE JOLIFF
Pour le mascara arcancil, le discours marketing de l’époque est tellement différent de l’actuel, c’est très amusant. On décrivait absolument tout, maintenant on n’imagine plus de lire un laïus pareil.