Les effets des ondes élecromagnétiques restent une question largement débattus. Ce n’est pas pour autant que le débat date d’hier.
Il y a des IoT comme on dit pour « Internet of Things » ou « Objet connectés » pour maintenant presque tous les usages, comme en témoigne ce développement de patch anti-ondes, et la question de leur sécurité d’actualité. Il y a aussi cette recherche de naturalité qui voudrait que les plantes aient des vertus extraordinaires comme celle de s’opposer aux « mauvaises ondes ». Et puis, il y a cette controverse sur les effets des ondes électromagnétiques qui dure depuis pas mal de temps et qui comme toutes les controverses oppose les avis y compris des spécialistes et fini par un débat sociétal. Elle a été engagée il y a maintenant pas mal de temps sans qu’il soit possible encore à ce jour de se faire une idée très précise des enjeux. Téléphones portables à la main, objets connectés partout dans la maison … les ondes ont envahies notre quotidien. Et fait apparaitre de nombreuses questions, comme c’est le cas pour les personnes électro hypersensibles. Les champs électromagnétiques de radiofréquence – comme les ondes émises par les téléphones portables – sont classés par l’Organisation mondiale de la santé dans la catégorie des cancérogènes possibles, et certaines études recensées par l’Agence Nationale de Sécurité Sanitaire (ANSES) montrent un risque potentiellement accru de tumeur cérébrale pour les utilisateurs intensifs. Pourtant, l’ANSES affirme ne pouvoir établir à date de lien de cause à effet. Cette controverse scientifique n’empêche pas un marché de la protection aux ondes de faire surface.
Qu’en est-il pour la peau ?
On peut dire sans prendre trop de risque que la situation est tout aussi compliquée. Mais ceci n’a pas empêché l’industrie cosmétique de s’intéresser à cette question il y a déjà pas mal de temps. Une marque innovante s’était intéressé dans la mouvance de son approche de protection à large spectre, à ces questions de façon anticipé.
Rappel : Nous sommes en 2002 et le Laboratoire de recherche de Clarins sous la conduite de Lionel de Benetti décide de s’intéresser aux effets des ondes sur le tissu cutané. Il nous raconte : « Il a fallu pour cela développer un système permettant d’irradier, de façon quantifiée, des cellules isolées et des explants de peau. L‘appareil, une étuve avec, au centre une antenne émettant à 900 MHz (fréquence la plus courante des téléphones mobiles à cette époque), a été mis au point en collaboration avec le CNRS. Les échantillons étudiés étaient exposés pendant 6h, puis l’expression des gènes était analysée par cDNA array et RT PCR. Il en était ressorti une influence significative sur l’expression des gènes impliqués dans la différenciation cellulaire et l’inflammation. Nous avons ensuite renouvelé les expérience en testant divers actifs, pour sélectionner ceux qui atténuaient les phénomènes observés. Au terme de ces études, le produit E3P a été mis sur le marché en janvier 2007. Il s’agissait d’une lotion aqueuse, sans autre propriété que la protection anti ondes ».

Au cours du lancement presse en Octobre 2006, la société déclarait : « La société Clarins a démontré au travers d’une étude de six ans en collaboration avec un institut de recherche universitaire que l’exposition à des objets électroniques, tels que les téléphones portables et les micro-ondes, pouvait accélérer le vieillissement de la peau. » Les ondes électromagnétiques artificielles provenant par exemple du téléphone et de la télévision sont un facteur supplémentaire dans le processus de vieillissement », a déclaré Lionel de Benetti, directeur de la recherche et du développement des laboratoires Clarins. « De plus en plus de personnes s’inquiètent des effets de notre environnement ». L’équipe de De Benetti a étudié les effets des ondes de 900 mégahertz – le type le plus couramment utilisé dans le monde pour les communications, selon Clarins – sur la peau. Les laboratoires ont découvert que, lorsqu’elle était exposée à de telles ondes, la production de radicaux libres de la peau augmentait, ses barrières de protection s’altéraient et le renouvellement cellulaire ralentissait de 26%. Les effets visibles ultérieurs comprennent une surface moins lisse et une peau déshydratée et plus sensible, facteurs qui contribuent au vieillissement de la peau ». « Ces ondes peuvent voyager à travers les murs », avait déclaré de Benetti. « Si nous considérons notre peau comme un mur de briques, ces ondes conduisent à une peau plus faible. » Il a ajouté que six heures d’exposition aux ondes électromagnétiques par jour pouvaient accélérer le vieillissement de la peau ».
Clarins alors s’est tourné vers des ingrédients naturels pour contrer les effets de la nouvelle technologie. La formule du produit comprenait :
- Un complexe de « défense magnétique » comprenant un extrait de Rhodiola rosea ou Orpin rose, une plante qui survit dans le froid sibérien extrême, et un extrait de Thermus thermophilus et un microrganisme marin qui se développe à 2 000 mètres sous la surface de l’océan Pacifique. Le complexe protège la peau des polluants et protège les cellules de la peau, selon Clarins.
- Un complexe anti-pollution comprenant du thé blanc pour ses bienfaits antioxydants, un extrait de cresson, qui se développe à proximité des autoroutes malgré les émissions de voiture, et un Glycofilm, censé protéger la surface de la peau.
Lotion E3P Clarins
Ce lancement a fait l’objet de nombreux commentaires et soulevé un certain émoi. Lionel rajoute : « Quelques mois après la mise sur le marché j’ai dû donner quelques explications aux autorités, anglaises et italiennes entre autres…qui ont demandé d’atténuer dans notre communication le côté « angoissant « de l’exposition aux ondes électromagnétiques… » Sur ce sujet, nous avions fait un poster à l’IFSCC de Barcelone et une publication dans le JID en septembre 2007. Et Lionel de Benetti de poursuivre : « Face au peu de succès du produit, il a été retiré du marché en 2009, me semble -t-il. À postériori, je pense que l’une des raisons de l’échec commercial a été son prix : trop cher (48€), mais surtout une revendication encore mal appréhendée à cette époque, l’absence de sensorialité et de propriétés complémentaires. Ce choix d’une formule simple avait été dicté par la volonté d’un lancement rapide craignant d’être doublé par une autre marque (sachant que dans notre métier tout le monde travaille sur les mêmes sujets simultanément…). Bien que le produit ait été discontinué, nous avions généralisé à l’ensemble des produits visage l’introduction des actifs que nous avions identifiés comme intéressants pour cette protection…sans toutefois communiquer fortement sur cet aspect des choses.
Mais les choses ne sont pas terminées pour autant. Dans une contribution plus récente (expression-cosmetique-50-selection-2), Rachida Nachat-Kappes se pose la question de savoir ce qui se passe au niveau cellulaire et si on peut transposer les effets observés au niveau du tissu nerveux à la peau. La littérature qu’elle propose indique clairement que les radiofréquences provoquent des dommages oxydatifs un peu comme les autres radiations. Les antioxydants seraient-ils suffisants ? Une autre cible cellulaire est proposée, le récepteur TRPV1 qui est également exprimé au niveau de la peau et impliqué dans l’apoptose. Il est également surexprimé dans certaines pathologies cutanées. Mais rien ne permet de conclure, d’autant que les quelques études disponibles ne s’intéressent que rarement aux effets sur le long terme. Un lien avec l’inflam’aging est évoqué. Une substance analogue à la capsaïcine est proposée.
Cet épisode illustre parfaitement une situation très courante dans nos métiers, qui est qu’il n’est jamais bon d’avoir raison trop tôt. Le momentum reste une denrée difficile à manipuler. A date on ne sait toujours pas si cette approche à un vrai sens, mais il serait illusoire de croire que c’est récent.
Merci et bravo à Lionel et ses équipes. Merci aussi à Rachida.
Jean Claude LE JOLIFF
NB : Si vous avez quelques épisodes de ce genre à nous conter, nous restons preneurs.
Merci beaucoup pour cet article Jean-Claude.
Pas de quoi et bienvenue. N’hésitez pas de faire du prosélytisme pour notre projet, et si vous avez envie de contribuer, ce serait avec grand plaisir